14ème jour

Choix difficile à bord du Souffle du Nord Kilcullen Team Ireland !

Soit continuer sur une route plutôt « Nord », et tenter de passer par-dessus une dépression à l’air plutôt traître, soit contourner cette dernière par le Sud. Chacune de ces options impliquant de toute façon un travail de titan avec des vents orientés Est et Nord-Est, notre direction générale.

En attendant, le Cap Horn se rapproche lentement mais sûrement, et il règne une bonne ambiance entre les trois associations de résidents qui se sont regroupées.

Advienne que pourra. A première vue la décision finalement prise de passer par le Sud pourrait fonctionner vu que la dépression s’est déplacée plus rapidement que prévu et entreprend de nous dépasser, notre bateau étant ralenti par des vents contraires. Mais se diriger au Sud est aussi synonyme de grand froid… Mes doigts gèlent rien qu’à l’écriture de ce message, un rituel que j’ai beaucoup de difficulté à accomplir aujourd’hui mais qui se doit d’être une discipline régulière, tout comme mener ma barque. On dira que c’est de la folie, je l’admets, mais c’est aussi follement discipliné et de toute façon ne faut-il pas être follement sain d’esprit pour entreprendre de raconter la folie de l’homme.

J’entame maintenant ma troisième semaine en mer et je suis plus que jamais sur le fil du rasoir.

Jour après jour, 24h / 24 et bien 8 jours sur 7, il y a constamment du mouvement et un risque bien présent. Pour un homme seul, et qui n’a qu’une paire de mains, il y a toujours quelque chose à faire sur ces bateaux tellement sophistiqués. J’oscille souvent envers mon bateau de l’amour à la haine, et bien que constamment en solitaire, je ne me sens pourtant jamais seul.

Je n’ai pas beaucoup progressé ces derniers jours. J’ai remarqué lors d’un contrôle de routine que la bôme s’était déconnectée du mât, le vit de mulet s’étant dévissé. J’en ai fait le constat deux heures avant à la tombée de la nuit, et même en baissant très rapidement la grande-voile, l’obscurité m’a battu dans mon combat à régler le problème puis remettre la bôme dans sa position initiale. J’étais épuisé et suis allé dormir, si on peut vraiment le qualifier de tel mon repos accroupi sur le siège du navigateur.

C’est fou ce qu’un peu de repos et un nouveau jour, un nouveau regard peuvent apporter..
Stratégie du jour : déboulonner le raccord du mât et reconnecter le vit de mulet  (heureusement, le pas de vis était à peine endommagé) quelques manoeuvres de positionnement de la bôme pour la remettre en place, et banco, problème résolu !

Une fois ce désagrément réglé nous avons eu presque aucun vent pendant presque 24 heures. Il faisait sombre, les voiles s’entrechoquaient et nous étions secoué par la houle. Puis en moins de 5 minutes, le vent est passé subitement à 35 nœuds. Dans ces conditions, pas facile de contrôler le bateau sans faire de dégât. Mais j’y suis parvenu, non sans stress, comme toujours sur le fil…. et je me suis remis en route.

Je tiens à ajouter que tous les faits ci-dessus ont été rapportés pour étude aux exécutifs de l’association des résidents de l’Océan Austral (SORA) à savoir Adolf le singe, Paddy le lutin et le nounours néo-zélandais dont les avis et points de vue étaient plus que déconcertants.

Pour moi, c’est une habitude permanente – et j’en ai d’ailleurs fait un métier – que d’apporter des idées, lancer des projets en groupe et surtout de rassembler des gens. Je suis fier de ce que j’ai accompli (même si je n’ai pas toujours eu du succès !) et de ce mix de différentes personnalités apporté par ce mélange de groupes, croyances et milieux socio-économiques. Ça marche d’ailleurs tellement bien que les différentes associations de l’Océan Austral, Indien et Pacifique Sud ont tous fusionnées en une globale : SORA.

Maintenant le Cap Horn m’appelle !

Que ce soit au niveau du Cap de Bonne-Espérance (renommé ainsi uniquement à des fins marketing mais autrefois appelé le Cap des Tempêtes) où l’Océan Atlantique et l’Océan Indien se rencontrent, ou au niveau de la Nouvelle Zélande avec la découverte du Pacifique Sud, les changements apportent toujours de nombreuses turbulences. Voyons ce que me réserve, avec un peu de chance, les deux prochaines semaines et mon retour dans les eaux familières de l’Atlantique !

We’re together again
We’re here, We’re here And Never
In the history of human endeavour
Has so much not been done
And a lot more to do

Nous nous sommes enfin retrouvés
Nous y sommes, là… nous y sommes
Et jamais dans l’histoire de l’humanité
Si peu de choses n’ont été faites
Et tant restent encore à faire

NB : traduction libre et poétique de l’équipe du Souffle du Nord !