14 novembre,
A l’Est de Kaikoura, Ile du Sud de la Nouvelle Zélande

Reprise de notre carnet de bord,
Acte II et vraiment nous sommes « sur la Terre du Milieu », en contournant à la voile la Nouvelle Zélande…

L’Acte III commencera en janvier lorsque je serai honoré d’être un véritable ambassadeur pour Le Souffle du Nord et la Team Ireland à bord de notre navire pour terminer notre tour du monde (avec une étape « convoyage » de 3 000 miles entre le sud et le nord de la Nouvelle Zélande).

Ensuite ce sera en solo que je reprendrai la mer vers les Sables d’Olonne pour – nous l’espérons – terminer (non-officiellement) le Vendée Globe au nom de nos 2 équipes, en ayant pris le risque d’un passage du Cap Horn et des mers du Sud sans le support d’une direction de course.

Enfin… Pour le moment tout est calme, il est 5 heures du matin le mardi 14 novembre. Nous sommes à 15 miles des côtes. L’obscurité de cette nuit sans lune commence à s’éclaircir, anticipant un levé de soleil printanier. Il y a un vent faible, tandis que nous nous préparons à traverser le détroit de Cook qui sépare les Iles du Nord et du Sud de la Nouvelle Zélande.

C’est fou, mais en mer comme ça, je ne peux m’empêcher de me dire que cette navigation au large de la Nouvelle Zélande, qui est pourtant déjà quelque chose, est finalement un tout petit challenge en comparaison à ce qu’il reste à faire pour terminer notre tour de la planète.

Cette planète, couverte au 2/3 par les océans, et qui ne cesse jamais de nous éblouir, de faire s’emballer notre imagination, et de nous rendre humble.

Tout est encore un peu irréel. Il me semble qu’hier encore j’étais sur le Vendée Globe à bord de Kilcullen Voyager, confiant et en route vers le Cap Horn. Et blam, plus de mât… Un nouvel objectif : survivre. Arrivée à Otago Bay une semaine plus tard… Un mât temporaire pour rallier Christchurch.
La rencontre et le partenariat de 2 équipes… Pour moi, c’était l’amour au premier regard (!) et l’évidence de la bonne décision à prendre. Pour nos partenaires français, toujours choqués de leur avarie, la romance a mis un peu plus de temps à s’installer…

Et maintenant « Le Souffle du Nord Kilcullen Team Ireland » est une réalité, réinventée, et j’emprunte les mots de Samuel Beckett qui reflètent humblement ma pensée en disant :
« Perhaps my best years are gone…. But I wouldn’t want them back. Not with the fire in me now »
*« Peut-être bien que mes plus belles années sont parties… Mais je ne voudrais pas y être encore… Pas avec le feu que j’ai en moi maintenant ! »

Plus tôt dans la semaine, nous avons vécu un peu sur le fil du rasoir. Sortir le bateau du chantier naval de Davie Norris à Christchurch, en interrompant le trafic de l’autoroute, pour réussir à l’amener et à le mettre à l’eau au port de Lyttleton était un défi. D’autant plus que la météo était mauvaise !

Heureusement le bateau est dans une condition excellente, les réparations ont été très bien menées. Des renforcements ont été fait là où il le fallait et il est certainement encore plus solide qu’avant !
Davie et son équipe ont fait un boulot fantastique et ils peuvent être fiers de faire partie de l’excellence de l’industrie marine de Nouvelle Zélande.

J’étais un peu nerveux en quittant Christchurch.

Il faut dire que nous venions de survivre à une « soirée de remerciements » à The Claddagh Pub ! Nous avons partagé cette soirée avec tous nos nouveaux amis de Christchurch, Michael Keane (de Sligo), Amanda Davis, qui travaille dans la construction de bateau, et Viki Moore qui est un nouveau membre du conseil de la « New Zealand Yachting Association », représentante de l’Ile du Sud et qui a bravé le vent printanier pour venir nous voir.

Et puis notre romantique équipier français devait quitter sa petite amie… Une histoire d’une femme dans chaque port ou quelque chose comme ça… Si seulement ! Heureusement qu’il y a la Guinness !

J’étais aussi un peu nerveux à propos des eaux dans lesquelles nous allions naviguer et des histoires légendaires qui s’y rapportent. Mais bon, le vent est faible… De toute façon se sera un bon test pour le bateau et notre équipement.

Notre but de cette première journée est Wellington, à 70 miles au Nord. En écrivant ses lignes, alors que le soleil se prépare à se lever au dessus de la capitale des Kiwis, je me dis que tout va très bien se passer.

Notre plus grande source d’inquiétude, alors que nous devons mettre le moteur de temps en temps, est de ne pas heurter un cétacé qui traverserait la Baie de Kaikoua, qui est connue mondialement comme une zone de rencontre et de reproduction des cachalots géants, des baleines à bosses, des baleines bleues et des baleines australes.

Heureusement, alors que l’Acte III sera en solo, pour le moment nous avons 5 personnes à bord pour le moment. Nos deux braves équipiers français, Pierre-Antoine Tesson et Maxime Bouy du Souffle du Nord. Puis Stuart McLachlan, un marin Kiwi et brillant (!), et Joan Mulloy, une marin talentueuse de la Team Ireland qui a des projets de Figaro en 2018, et des aspirations à une participation au Vendée Globe que nous devrions tous supporter !

Comme toujours, votre skipper est heureux en mer, et aussi d’avoir passé facilement le test du véritable Irlandais… Je vous le rappelle : un véritable Irlandais est celui qui ne va jamais se coucher le même jour que celui qui a vu son lever !

Enda O’Coineen